Il existe dans de nombreuses langues un mot qui désigne à la fois l'acte de donner et celui de prendre la charité et l'avidité la bienfaisance et la convoitise - c'est le mot : amour. Mais qui croit encore au désintéressement ? Qui prend pour argent comptant l'existence de comportements bénévoles ? Depuis l'aube des Temps Modernes toutes les généalogies de la morale font dériver la gratuité de la cupidité et les actions nobles du désir d'acquisition. Il n'est pas sûr cependant qu'en reléguant l'amour du prochain dans la sphère de l'illusion nous soyons mieux à même de penser le réel. Il se peut au contraire que nous ayons besoin de ce concept démodé et d'une autre intrigue que celle de la possession pour comprendre la relation originelle à autrui et à partir de là aussi bien le rapport amoureux que la haine de l'autre homme. En s'inspirant de l'œuvre d'Emmanuel Lévinas Alain Finkielkraut interroge d'un seul tenant les grandes expériences collectives de notre modernité et le rapport à l'Autre dans la vie individuelle. Philosophie sans doute mais philosophie dramatisée par des personnages concrets et par la présence de la littérature qui à travers Flaubert James et surtout Proust est traitée ici en moyen de connaissance de l'homme